Des choix de la Spiritualité

 

Des choix de la Spiritualité

Voir que tu construis une cathédrale en taillant une pierre est spiritualité ; chercher la Vérité au tréfonds de l’Univers, aussi. 

Esprit, âme, raison, conscience?

Mon compas trace large ouvert, mes bras, aussi.

L’Esprit[1], est la vie qui s’est rendu compte qu’elle est.

Sentients, capables de nous examiner et de juger, nous sommes notre esprit, notre âme, comment se passer de ce mot ?

Cette entité consciente de soi, est impalpable à ce jour. Est-elle faculté, fonction de la matière vivante, phénomène vécu ou essence immatérielle, étincelle de souffle divin ? La dispute va continuer, longtemps... 

Certes, notre esprit n’est pas chose fabriquée il est né. Pareil au vivant dans lequel il habite - qui donne naissance à la nouvelle vie – il crée ce qui n’était pas avant et il agit [2]. Sur Terre, seul l’esprit est donneur de noms[3], faiseur des langues et d’art.

Mon souffle vital, pneuma, anima, âme, psychisme, « vie mentale », est-il périssable ou immortel ? Accordé par la Divinité ou surgi de l’évolution de la Matière ? Je ne le sais… le fait est que nous ressentons cet état, nous sommes cet état sans pareil. Nous éprouvons, chacun, directement, à la première personne, le goût de ce qu’est être sciemment quelqu’un[4], sentir joie et douleur, juger, vouloir, désirer… Sans lui nous ne sommes personne.

Il y a vie de l’esprit si en notre for intérieur ont cours des sentiments et des valeurs, des vertus, des doutes et des convictions, l’action, l’humilité, des devoirs et libertés. Une vision du monde et un espoir peuvent s’appeler déjà spiritualité. A l’opposé, les machines sont des engins fabriqués de substances mortes, leurs algorithmes purgés n’ont rien d’une spiritualité, seulement la vie en est capable. La vie de l’esprit seule, fait de nos filiations de mortels des histoires de vie uniques et irremplaçables plutôt que des chaînes d’élevage et de production. C’est la vie seulement qui est douée d’espérance, d’idéal, de pardon et de promesse. La vie et la société des humains.


Tout ceci émerge naturellement de l’univers matériel ? Peut-être. Pourtant, cette vie de l’esprit est une chose qui, dans les limites de nos connaissances, ne se trouvait pas dans la Nature sans nous ; les idées ont généré la transfiguration de notre espèce et du monde... Il me semble raisonnable de considérer l’unicité de ce « phénomène ».


Pour la raison sèche, la spiritualité reste une subjectivité, une illusion, voir, une superstition. Ceci me semble déplorable, car ce qui désenchante le monde – même la vérité scientifique quand elle est exclusivement de la matière inerte, des abstractions et des machines – assèche la spiritualité et dégrade l’humain. Par des méthodes qui nient l’existence de ce qu’elles n’ont pas prouvé et mesuré, rien ne reste en main en dépeçant le comportement et le corps afin de contrôler s’il y a l’esprit. Pour citer Goethe (en original, car il est mal traduit) :

„Wer will was Lebendig's erkennen und beschreiben,
Sucht erst den Geist heraus zu treiben,
Dann hat er die Teile in seiner Hand,
Fehlt leider nur das geistige Band.“
[5]

 “Qui veut déceler et décrire le Vivant/cherche se défaire de l'Âme avant, /puis, bien en main sont les parties, / hélas, manque juste le Lien - l'esprit.”

Nier l’existence de l’esprit, dégrade l’homme.

Vie spirituelle, spiritualité, intellect, religion ? Humaniser le chaos.

Il y a aussi un brin de spiritualité en tout savoir, même intuitif, en tout symbole ou métaphore, mais parler, connaitre et expliquer n’est pas tout. Une étincelle d’esprit vit en chacun de nous, connaissante, éveillée et sensible, pourtant, pour affirmer une vie spirituelle, il faut comprendre l’émerveillement, notre propension historique à enchanter le monde en lui attribuant signification et destinée.

La spiritualité est encore plus que ceci, bien entendu ; c’est l’esprit des humains réunis en civilisation, quand ils osent et se surpassent, de mille manières, vers des théories et idéaux qui transcendent la matérialité vulgaire ; que ce soit par le savoir compris ou par la foi, le mystère ou la raison, par l’intuition, par le génie, par le sacrifice, par la musique, par la découverte et le culte de la vérité, par l’extase ou les mathématiques… pourquoi pas. On vit notre spiritualité de diverses manières, solitaires ou ensemble. Par la méditation, l’extase, par la prière, par un satori ou une révélation, ou en comprenant soudainement, en exclamant « Aha ! Eureka ! » … On exprime la spiritualité par une diversité de symboles et rituels, par des cérémonies, mais aussi par l’appartenance, le vécu et le faire de chacun ; le travail bien fait, la pierre bien polie, l’œuvre inspirée, l’art vécu, la pensée selon la méthode scientifique ou la philosophie.

Notre monde ainsi enchanté ou expliqué, nous devient compréhensible, cohérent, prévisible, digne, porteur d’espérance. Pour parler vraiment de spiritualité, l’essentiel est ce que l’être pensant éprouve, croit et fait du vécu, du savoir et des idées, pas seulement ce qu’il sait…

La raison de la spiritualité est d’apporter humanité et harmonie dans le chaos.

L’abondance éphémère, la somme de tous nos esprits ici sur Terre – la Noosphère[6] - englobe l’ensemble des vies mentales de l’humanité, vécus émotionnels et moraux inclus. Leur mémoire collective survit à la mortalité. Naturellement. Une partie de ces trésors se garde dormante, inscrite dans des livres, les édifices les outils et les arts. Une autre partie, vive, habite nos vies mentales, nos souvenirs, les langues et les coutumes des nations. Elle circule par notre communication. Le tout se perpétue à travers les générations, par les traditions, par les sagesses, les spiritualités et les savoirs, les cultures, les civilisations.

De sa rencontre avec la réalité[7], la société de Homo Faber extrait connaissance et pouvoir, mais elle y rajoute sens et valeur. Ainsi seulement, l’esprit éveillé de la vie devient véhicule et contenant d’une vie spirituelle.  

Car l’Humanité, comme la Vie, apporte à l’Univers aveugle, qui s’ignorait, sens et formes qui n’y étaient pas et qui, sans l’Homme, disparaîtraient. Sur la « Nature telle qu’elle est », l’homme décalque ses significations, ses mesures, ses façons de comprendre et l’expression de ce que les choses valent pour nous humains. L’Homme apporte ses manières de vivre et de gérer son monde, avec des outils spirituels qui ne se trouvaient pas dans la matière sans lui : la Raison et le savoir, la Méthode Scientifique, mais aussi la compassion, l’espoir, la foi transcendante, la morale, la responsabilité, l’esthétique. L’homme apporte ses questions, son « Pourquoi pas ? », la tristesse, le regret et le rire, la fidélité et la trahison, la solidarité et le rejet. L’homme apporte les mots et avec eux l’outil de la vérité, du mensonge et de l’art. D’où viennent le non-être, les mathématiques, l’Utopie, le Bien et le Mal, la Beauté, sinon de l’esprit ? L’homme invoque et honore, il discerne et célèbre le sacré. L’homme institue des symboles et des vérités morales, invente des formes nouvelles et s’empare de forces démiurgiques capables de donner forme ou, au contraire, de transformer, de déformer ou tout détruire.

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L’Esprit intelligent, dès qu’il s’éveille, devient cause. Par anticipation, l’intellect est capable de décider à l’envers du temps, depuis un avenir imaginé, depuis ce qu’il croit ou calcule, vers l’ici et maintenant, pour former son intention et agir. Ainsi, une religion ou une doctrine peuvent devenir un empire sur Terre. Par ce pouvoir, avec ses choix, l’esprit, le penseur, le croyant, deviennent initiateurs et responsables. Ils débutent des cours d’action nouvelle, ils façonnent les substances, organisent, inventent et procèdent à rendre réels des outils puissants, des œuvres et des sociétés tels que le monde « devrait être » d’après notre point de vue humain. Un monde potentiellement bon, beau, vrai, juste, sage, généreux, fraternel, sacré. Ou l’inverse. Pour le meilleur et pour le pire. Car la spiritualité peut servir autant la vie que la mort, génératrice ou dévastatrice, humaniste ou antihumaine[8].

Tout ce qui est spiritualité n’est pas nécessairement bon.

On est justifié de dire qu’on a une vie spirituelle quand l’aspiration de vivre, comprendre et de faire embrasse autre chose en plus d’un Univers exclusivement mécanique et biologique, fait de substance, énergie, information, déterminé sans liberté, par des causalités réduites à la physique et aux autres sciences « exactes » L’être humain et sa société ont un besoin inné de vivre plus haut, de croire et révérer quelque chose, même une utopie.

« Nous sommes de l'étoffe dont sont faits les rêves…»[9]

La vie de l’esprit devient spiritualité… pourvu qu’on la respecte

Tout commence humblement : ma spiritualité s’éveille quand que je me demande pourquoi je vis, pourquoi je suis né, moi et pas un autre, à quoi je sers[10]. Quand je comprends que je ne comprends pas et je suis curieux de ce dont je suis ignorant au lieu d’en être fier. Quand je m’étonne et je m’émerveille. Quand je me passionne pour des idées. Quand je pose des questions, surtout « Pourquoi ? ». Quand je doute. Quand je découvre quelque chose qui change ma vie comme une nouvelle lumière. Quand je ressens l’enchantement et l’altruisme. Quand des actions ont sens pour moi, pas seulement cause ou utilité. Quand je me construis une citadelle intérieure à l’instar de Montaigne ou de Goethe. Quand mes pensées sont belles. Quand je veux devenir meilleur.[11]

J’exerce ma vie spirituelle quand, scientifique ou mystique, je réfléchis au-delà de mon corps, de ma survie animale et sociale, de mes intérêts et plaisirs et de la souffrance primaire, la chair et les os. Je la vis quand je ressens comme une attirance les limites de ce que je suis et sais, de mon savoir et de mon ignorance aussi. Ceci m’enrichit sans cesse, l’ennui est impossible. J’attends de ce monde intérieur passionnant qu’il me guide et me soutienne d’espoir durant mon voyage par la grande forêt du connu et de l’inconnu, même par-delà de la mort. Avec ma spiritualité, je ne suis jamais seul.

Je crois que s’ennuyer souvent signale le manque de spiritualité.

La face visible de la spiritualité, qu’elle soit laïque ou religieuse, nous la pratiquons sous forme de rituels et de cérémonies. C’est une multitude de rituels, gestes symboliques et communions - quotidiennes ou sacrées.

Toute activité humaine importante acquiert avec le temps une valeur symbolique et tend à se ritualiser.

Une pluralité de spiritualités – Un jardin d’échelles vers le plus haut

Dans mon opinion, la spiritualité est ainsi la vie de l’esprit – ce souffle si léger que la Science d’aujourd’hui n’arrive pas encore à le saisir ou le mesurer[12] – quand elle se hausse et se dépasse, que ce soit par le savoir, par la raison, par l’intuition, par le talent, par la foi, par l’émotion, par la découverte ou la révélation si vous voulez. On la vit de mille manières, par des évènements révélateurs et des rituels sociaux ou religieux, des cérémonies ou spectacles ou par la méditation, par l’extase, par la musique[13]... On la vit aussi par la vocation et par l’œuvre ; qui va nier qu’il y a une spiritualité du travail, de l’ouvrier et de l’œuvre, de la chose bien faite, inspirée, qui rejette la médiocrité au service de ce qui est plus haut ?

Dire qu’il y a une seule manière de s’élever spirituellement, la seule spiritualité vraie et exclusive, devient souvent un aveuglement totalitaire ou un mensonge.

Inévitablement, par la pluralité de modes de vie, d’intelligences et de domaines, il y a plus qu’une spiritualité : l’Humanité a ses intelligences et ses mentalités dissemblables, qui ressentent et comprennent, qui savent et croient avec des différences irréductibles. Ces Weltanschauungs, agissent pour concevoir et pour changer le monde à leur image. La spiritualité des Hommes ici sur Terre[14], on l’a observée en une multitude de formes, contemplatives ou actives, des progressions du savoir et de l’imaginaire qui ont évolué du temps des cavernes à nos jours[15]… L’Histoire, la Civilisation, la Terre transformée par l’Anthropocène, la condition humaine, en résultent, toutes œuvres de notre esprit.

Comparer et mettre en hiérarchie les voies de spiritualité n’est pas raisonnable, car elles sont plurielles et ceci veut dire incommensurables. Parfois incompatibles. On peut rêver les réduire l’une à l’autre en imposant un seul critère de vérité, de réalité ou de mérite. Elles correspondent à des domaines de vie différents. Elles suivent des intérêts différents. Quelle absurdité de se faire arbitre unique dans ce jardin d’échelles vers le plus haut, autant de voies d’élévation !


Non seulement il y a plusieurs voies[16], mais souvent, en la même personne, on en observe plus d’une à l’œuvre ; rien n’empêche le grand savant d’être grand croyant ou mystique, le poète d’être religieux ou athée, le danseur d’élever le corps à l’idée et au sacré. Rien n’empêche le prêtre d’être dédié à la Méthode Scientifique – savant qui consacre sa passion à la science ou à l’art. Rien n’empêche l’athée d’être grand érudit, même scrupuleux théologien, qui réfléchit et agit de bonne foi au service de la spiritualité. La largesse d’esprit permet la coexistence dans la pluralité.

Pourtant, respecter cette altérité requiert tout d’abord s’ouvrir l’esprit, concevoir qu’il y a inévitablement des choix de la vie de l’esprit. Ce sont des portes et des voies ouvertes à la liberté autant de conscience que de croyance et à la dignité de l’homme, au respect de soi mais aussi d’autrui. On y a tous droit, le progrès spirituel de la Civilisation les a inscrits dans les Droits de l’Homme, de pair avec la recherche du bonheur.

Il y a la spiritualité du visionnaire, du poète, de l’écrivain, qu’on ne peut pas distiller à une seule quintessence ; Homère, Lucrèce, Ovide, Victor Hugo, Byron, Shelley, Shakespeare, Schiller… enfin un Baudelaire, Rimbaud, Verlaine, Apollinaire, portent chacun leur spiritualité complexe. Des chefs-d’œuvre - je pense à des auteurs du calibre de Rabelais, Goethe, Tolstoï, Thomas Mann, Hermann Hesse… ou George Orwell - suscitent des vues du monde qui éduquent l’humanité [17], qu’elles soient religieuses ou non. On ne va pas leur nier la spiritualité quand ils pensent autrement.


Que dire de la voie du guerrier, du Hagakure des samouraïs, des Arts de la Guerre de Sun Zi sur leur arrière-fond de Tao-te Ching, du tout faire par le vide et le non-faire?

Des génies de la guerre dont on ne se souvient pas car ils étaient parfaits, ou d’autres, sanguinaires, comme Alexandre le Grand, Gengis Khan, Bélisaire ou Napoléon… n’ont-ils pas vécu selon une spiritualité machiavélienne du conflit, de la conquête et de la victoire, une mentalité de la domination qu’on ne peut pas nier ou négliger ? Les Marines, la Légion Etrangère ont leur esprit de corps, bien authentique. Dans leur training on se croirait en rituel d’initiation. Une spiritualité du devoir, du courage, de la camaraderie, de la loyauté jusqu’à la mort.

Il y a dans le yin et yang de l’univers conçu un pôle contemplatif – la méditation ou l’extase mystique, l’enthousiasme ou la sérénité, le faire par le non-faire... Il prend distance ou se confond avec l’Univers et ainsi il se lève au regard d’en haut, du dedans, en dedans. Avec ou sans dieux. Pour vivre après la mort ou pour se dissoudre dans le Tout.

Les arts, partis en timides ébauches de manifestation spirituelle, puis servants des religions et des potentats, se sont métamorphosés au cours de l’histoire en porteurs de spiritualité à part entière : Leurs formes et images, le jeu des symboles et des couleurs, leurs mouvements, leurs sons harmoniques, leurs rythmes, moulent les émotions et le vécu des peuples. Chaque art apporte sa langue et sa sensibilité propre pour enrichir le monde avec des œuvres uniques. Les arts suffissent à combler de beauté les vies de certains créateurs et nourrir l’héritage des civilisations et la spiritualité de ceux qui s’y nourrissent.

L’architecte et le maçon, le peintre génial, qui érigent et décorent les cathédrales et les cultures, le danseur, la ballerine, qui expriment en mouvement, le dramaturge et son acteur qui donnent vie à la scène et éduquent des nations, la musique qui adoucit les mœurs, divine – on peut dire – par elle-même, la voix qui chante et qui envoûte, tous vivent et éveillent des spiritualités authentiques et intenses… de la chose bien faite, la chose belle, à la chose qui change le monde.

Le matérialisme pur et dur, même défini contre toute spiritualité, est à mon avis une forme d’anti-spiritualité[18], contrepartie rebelle de la spiritualité religieuse. Avec ses ascèses, idéaux, valeurs et vocations, tous ces libérateurs, Démocrite, Épicure, La Mettrie, Diderot, Holbach, Voltaire, … jusqu’à Karl Marx, manquent-ils de vie spirituelle ? Ne proposent-ils pas leur foi alternative, leur culte du Progrès, de l’économie ou du politique qui a changé le monde ? Une spiritualité sans religion

Et les idéologues – idéalistes abstraits ou haineux – ces corrupteurs qui manipulent l’imaginaire des foules, n’ont-ils leur ersatz de spiritualité noire ou rouge, antihumaine, totalitaire et utopique ? L’esprit du communisme n’a-t-il pas assez hanté l’Europe pour le prouver ? Le fascisme n’a-t-il pas failli nous engloutir ? Pour ne pas finir en chair à canon des nouvelles ou revenantes idéologies qui, au lieu de s’élever, s’engouffrent dans la matière – post -humanisme, technoscience, écologisme radical – il est urgent de révéler et déconstruire l’inhumanité de leur mentalité profonde plutôt que de s’éblouir de leur surface enthousiaste.

Les Frères ennemis

Bien entendu, la grande alternative à la spiritualité que les religions, qui osent croire, revendiquent comme leur héritage exclusif, légué par Dieu, est devenue la Science à laquelle les églises dénient toute spiritualité en la reléguant au niveau de la vulgaire matière. Ceci au point de revendiquer marque déposée exclusive sur les mots « esprit », « spiritualité » ou « vie spirituelle »[19]. Les pontes de la science le leur rendent bien, en niant l’existence de la divinité et, du même pas, de l’esprit.

 La Science est pourtant une grande voie de vérité, parmi les voies de la spiritualité. Celle qui ose savoir au lieu de croire. Celle qui remplace le Chaos avec un Cosmos[20]. Voir Galilée, Isaac Newton, Max Planck, Darwin, Niels Bohr, Einstein, Werner Heisenberg, les Curie, Stephen Hawking… La spiritualité de la Science est l’enchantement de la découverte et l’idéal de la théorie. Les systèmes sont ses œuvres d’esprit.[21]

Dans l’Histoire, la religion et la science sont, à mon avis, deux cultures puissantes qui comprennent et façonnent la réalité différemment. Les deux sont sans limite, parties pour tout couvrir, sans bornes. Deux frères ennemis, des Caïn et Abel engendrés par les successions historiques de la spiritualité humaine. Je dirais que la Science est la face de la spiritualité qui se veut objective, opposée à d’autres, morales ou idéales, comme la Religion. La science, spiritualité de la curiosité et du rationnel, extrait et distille du monde une théorie de la réalité[22] ; les prémisses de cette théorie transcendent en spiritualité invérifiable, le savant surpasse l’explication de causes, en se demandant ce que sa découverte signifie pour l’humain ; ainsi, les données et l’information deviennent sagesse qui fait comprendre et maîtriser ce qu’on découvre ou invente en faveur de l’humanité au lieu de subir un « progrès » idolâtré. Science et foi sont des choix justifiables en leurs propres termes en leurs propres domaines. Ce siècle est mûr peut-être pour surpasser la négation réciproque vers une vision plus spacieuse, de complémentarité plurielle.

L’univers, « objectif » comme il l’est, vaut pour nous à travers ce qu’il représente pour nous, par ce que nous comprenons pour en faire usage ou nous en protéger. Notre Univers est humain. Il devient spirituel par nos symboles et notre foi, le respect et l’interdit du sacré, par l’amour, par la beauté ou la laideur, le bien et le mal, la justice et l’injustice, plus que par la falsifiabilité ou la vérité scientifique et encore moins par la réussite des technologies et des empires du profit.

L’esprit scientifique, c’est de trouver insupportable de ne pas savoir et quantifier ; devenu dogme, il brûle de simplifier l’inconnu, en le réduisant à quelque chose de cohérent avec ce qu’on sait, au moins de mesurable, connaissable et explicable. Prévisible aussi. Le reste ne compte pas, n’existe pas, pour de vrai... Sur ma voie personnelle, une des maturités a été de respecter le droit à l’erreur et à la différence irréductible des convictions, d’apprendre au contraire à vivre sereinement, confiant du peu que je sais et comprends, comme avec une petite bougie allumée, au milieu de l’univers, que je crois inépuisable d’inconnu.

L’athéisme lui-même, matérialisme devenu mouvement de pensée et de révolte, se définit – curieusement à mon sens – par négation de toute divinité … mais afin de sacrer l’homme, la Raison et la liberté de penser. Il propose sa conviction émancipatrice comme une alternative somme toute spirituelle... Voir d’Auguste Comte à Richard Dawkins, Christopher Hitchens, et d’autres passionnés… C’est toujours la métaphore mythique de Prométhée.

Au sommet de la vie de l’Esprit, les grands philosophes de l’Antiquité, comme les saints, proposaient des spiritualités et surtout les vivaient[23]. Les philosophes sont souvent des sages. Personne ne va leur nier la vie spirituelle des penseurs, leur « amour pour la sagesse » leur vie contemplative, indépendamment de ce qu’ils professent. On ne va pas nier que Platon ou son Socrate proposent une spiritualité, Aristote aussi. Mais qui va soutenir que Nietzsche n’a pas vécu une grande vie spirituelle ? Les philosophies sont autant de propositions d’idéal, qui apportent sens et civilisation au Monde, qui cherchent à discerner l’ordre dans le chaos… 


Les croyances, théories, idéologies, convictions, dogmes, utopies, même les terribles dystopies, sont autant d’idéaux de perfection. Toutes ces voies visionnaires, nobles, parfois en collision avec le bien-être de l’Humanité, visent à créer « L’homme nouveau ». Il arrive qu’on croie grimper sur une échelle de Jacob quand ce n’est qu’une tour de Babel. En fait, notre spiritualité est peuplée d’une pluralité d’histoires merveilleuses, mythes, récits fondateurs, légendes, croyances, traditions, cultes, rituels initiatiques et d’élévation sacrés ou civils, savoirs plus ou moins certains, dogmes plus ou moins figées, logiques plus ou moins prouvées, enfin, une longue liste de ce qui compose notre culture toujours changeante. Sans ce monde mental de métaphores, on vivrait comme des fourmis.

Elles sont nombreuses, ses échelles qui montent. Je conclus que les spiritualités humaines sont cent nobles fleurs qui fleurissent, un kaléidoscope de voies vers le plus haut, presque indépendantes de comment on conçoit ce plus haut ; Ciel, divinité, Etoile du Nord, morale, la Vérité, l’extase, l’ataraxie… ou plus largement, la sagesse et le bien-être de l’Humanité. A ce point de ma recherche spirituelle, je crois – sans grande originalité – que le voyage vaut plus que la destination.

Mille chemins forment la quête spirituelle émancipatrice accessible à chacun d’entre nous, plutôt qu’une vérité reçue toute faite pour nous caser, aussi parfaite qu’elle soit. « Nous sommes de l'étoffe dont sont faits les rêves… »

Oui. Le compas est largement ouvert.

 

Ioan Tenner Véme Ordre Grade 9 

Grand Orateur du Suprême Conseil du Rite Moderne pour la Suisse

 


[1] Une investigation de ce qu’est la vie spirituelle doit commencer par une idée de ce qu’est l’esprit, car c’est dans ce creuset qu’elle émerge et évolue, même si tout ce qui est activité de l’esprit n’est pas nécessairement sensibilité spirituelle. Ce que j’appelle ici spiritualité est la phénoménologie, les manières, la dont la sensibilité du vivant vit le monde.

[2] Les Hommes, étant doués d’esprit, jugent avec intention et valeurs, forment de nouvelles idées et artefacts, choisissent, commencent de nouveaux cours d’action. Pour cette « nouveauté » qu'on ne peut pas contrôler, voir Arendt, Hannah, The Human Condition, Univ. of Chicago (Chicago, 1958,1998) et Arendt, Hannah, Life of the Mind (Harcourt, 1981) passim

[3] Platon, Cratyle : donneur de noms ou onomaturge, créateur des mots – ces choses qui qui désignent l'essence des autres choses

[4] Voir Thomas Nagel, « Quel effet cela fait-il d'être une chauve-souris ? »  In Vues de l'Esprit, Hofstadter, D., & Dennet D, (Eds) 1981, 1987

[5] Goethe, Faust, Der Tragödie erster Teil, 1808. Studierzimmer, Mephistopheles zum Schüler.  Je me suis essayé à une traduction en Anglais : “To reveal and describe what life is about/They need first from body the spirit to rout/Then, handy and orderly, study goes on/Except that, the tie, which was spirit, is gone” http://wisdom.tenner.org/the-state-of-the-art---an-impression.html ou, dans mon Français approximatif : “Qui veut décrire et définir le Vivant/doit se défaire de l'Âme avant,/puis, bien en main sont les parties,/ hélas, il manque le Lien - l'esprit.”

[6] Concept introduit par Vladimir Vernadsky, et mis en valeur par Pierre Teilhard de Chardin en 1922, imaginé comme une couche de pensée et de conscience, une « nappe pensante », véritable tissu de la société humaine, qui envelopperait la surface de la Terre. Dans cet écosystème métaphorique, des idées et des humeurs – qu’elles soient familières, de travail ou de proie, coexistent en compétition et se nourrissent les unes des autres. Quand leur temps est venu, elles se réunissent formant des mentalités, l’esprit du temps (Weltanschauung), des mouvements qui stabilisent ou chambardent le monde humain. Tout ceci n’est pas réductible à la pensée seule.

[7] J’adopte la vision de  Karl Popper, Three Worlds THE TANNER LECTURE ON HUMAN VALUES, The University of Michigan April 7, 1978 pp 143-145 : 1er monde – Le monde physique subdivisé en monde non-vivant et monde vivant; 2e monde – le monde mental ou psychologique, subdivisé en expériences conscientes, rêves et sous-conscientes – dont la réalité est niée par certains mais admise par le sens commun; 3e monde – celui des produits de l'esprit (mind) humain: langues, histoires, mythes religieux, conjectures ou théories scientifiques, constructions mathématiques , chants, symphonies, peintures, sculptures... aéroports etc.

[8] Comme dit Romain Rolland, « L’esprit ne sait pas toujours choisir. » (Préfacé à Stefan Zweig, Nouvelles d’une mauvaise passion, Paris, Stock, Delamain et Boutelleau, 1927)

[9] La Tempête (1611) de William Shakespeare

[10] On s’éveille à cette vie en voyant plus grand, par petits pas. Ou par l’intuition, la découverte et la révélation soudaine. On s’y initie en dépassant l’utilitarisme quotidien, pour chercher un sens à ce qu’on fait et à la mort, au plus haut que nous, au pourquoi de l’Univers…

[11] Si je continue ainsi je vais arriver à me demander avec Kant « Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m’est-il permis d’espérer ? » J’aurais « le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi ».  Voici la spiritualité qui se lève!

[12] On peut parler d’avoir une vie spirituelle quand l’esprit fleurit au point d’enrichir le vécu de celui qui a un nom, des ancêtres et des descendants, qui dit « je sais, je ne sais pas, je crois, je doute, je pense, je choisis, j’agis, j’aime ».

[13] Il y a spiritualité là où, dans notre conscience, ont cours des sentiments et des valeurs, des vertus et des vices, des doutes et des croyances, devoirs et libertés, visions et intentions. A l’opposé, les machines n’ont pas de spiritualité, seule la vie en est capable. C’est seulement la vie qui est capable d’intention, d’espoir, de souhait et demande, d’idéal, de pardon et de promesse.

[14] Il me semble raisonnable de commencer considérant que vie spirituelle est ce que semblent faire et dire les gens réputés être des personnalités de grande spiritualité et d’affiner successivement cette observation. Le réveil (Erklärung, Enlightenment) spirituel de l’époque axiale décrite par Karl Jaspers me semble donner l’exemple de ces créateurs de religions, de philosophies, de sciences, économies, technologies et d’empires (Vom Ursprung und Ziel der Geschichte. München & Zürich 1949 (Darstellung der Achsenzeit)).

[15] Premières célébrations de la nature, sacrifices, respect des morts, l’animisme, les mythologies, symboles, magie, outils, rituels, préceptes, enseignements, traditions religieuses, folklores, savoirs ésotériques, œuvres et chefs-d’œuvre, conquêtes fondatrices, sphères morales partagées, théories, philosophies, utopies, dogmes, idéologies, Zeitgeist… L’Histoire en entier, la Terre transformée par nos architectures, la condition humaine, en résultent.

 

[16] Même les divinités sacrées des grandes religions sont plurielles; est-il raisonnable d’imposer à autrui un des trois monothéismes abrahamiques, en déclarant fausses toutes les autres, hindoues, bouddhistes, confucéennes, shintoïstes et j’en passe… ? Est-ce qu’un Gandhi manque de spiritualité ?

[17] Bien entendu, les handicapés de spiritualité vont assener leur suffisance : “What’s the use of stories that aren’t even true?” A quoi servent ces histoires qui ne sont même pas vraies ? (Salman Rushdie, Haroun and the Sea of Stories, Penguin, London 1990)

 

[18] Nier l’esprit avec intelligence n’est pas la spiritualité… à l’envers ? Par contre la nier ou la négliger, incapable de saisir son sujet est manque de spiritualité.

 

[19] Pour preuve, le prestigieux Oxford English Dictionary affirme encore en son édition de 2013 que « spirituality veut dire tout d’abord 1 : « le clergé » 2 : « propriété ou revenu ecclésiastique…de caractère purement spirituel » 3 : « The quality or condition of being spiritual; regard for spiritual as opp. to material things; spec. the study and practice of prayer... leading to union with God…une remarque pieuse… »  4 : « le fait ou condition d’être non-physique » ! Chambers Thesaurus 2012, plus généreux, accepte la diversité de la situation de fait : « dedication, commitment, consecration, ardour, loyalty, faithfulness, allegiance, adherence, trueness, staunchness, constancy, solidarity, unselfishness, self-sacrifice, zeal, support, love, passion, fervour, fondness, attachment, admiration, warmness, closeness, adoration, affection, reverence, steadfastness, regard, earnestness, formal fidelity, 2 devoutness, piety, godliness, faith, holiness, spirituality, sanctity, religiousness 3 prayer, worship, observance Holiness, sacredness, sanctity, spirituality, divinity, piety, devoutness, godliness, consecration, dedication, saintliness, blessedness, religiousness, goodness, virtuousness, righteousness, purity, morality, virtue, perfection, sinlessness, chastity, self-denial, self-sacrifice, asceticism, uprightness, old halidom, sanctimony (Antonym: mysticism) deism, theism, spiritism, supernaturalism, transcendentalism, esotericism, occultism, mystery, mysteriousness, incomprehensibility, inexplicability arcaneness piety piousness, devoutness, godliness, saintliness, holiness, sanctity, religiousness, religion, faith, devotion, reverence, respect, fear of God, deference (Antonyms: impiety, irreligion) …

 

[20] Popper, Karl, Unended Quest, An Intellectual Autobiography, Routledge (2002)p. 18

[21]  Digne de ce nom, le scientifique n’est pas – comme certains – un mécréant, mercenaire du gain, du pouvoir ou de la technologie, mais un moine chercheur ou grand pontife qui a reçu le sacrement de la Méthode. Son ministère est une œuvre de vie vouée à la Vérité et au service de l’Humanité. Récemment la science s’est donnée à la grande finance et fait aussi la vaisselle pour la jeune déesse déchainée, la Technologie. Ensemble ils ont enfanté la Technoscience qui mue sous nos yeux en nouvelle et ultime « spiritualité » du post-humain). On ne va pas nier que leur post-humanisme est une proposition de religion sui generis…

 

[22] Pour la science du XXe siècle, la Rationalité est la forme suprême de la spiritualité humaine. La théorie scientifique, l’image scientifique du monde, sont régies par des croyances incontestées et irréductibles, par des valeurs propres à la science : la Vérité comme valeur ultime, la Rationalité, la causalité, le Progrès, le Monisme, la réduction au plus simple, l’émergence, le saut qualitatif, la réplicabilité, la falsifiabilité, les lois, la quantité, la mesure et la quantification avant tout…

[23] Pierre Hadot-Exercices spirituels et philosophie antique, Études augustiniennes, Paris(1987) passim.

Algunas consideraciones rituales sobre la Plancha de Trazar


Si deseamos tener siempre una fuente de reflexión simbólica, y por tanto de conocimiento, basta que recurramos al siempre inagotable manantial de nuestros rituales ricos en mensajes capaces de mostrarse con intensos y múltiples matices. Bien es cierto, que dicha propuesta de estudio ritual personalmente la concibo en la línea de aquellos perennes vehículos de vivencia simbólica que nacieron con el génesis de nuestra francmasonería especulativa, y no por una razón de estancamiento de la tradición, lo que supondría una contradicción en sí mismo en el fenómeno de transmisión, dado que ésta es vida y evolución, aunque debe estar al abrigo de mutilaciones o injertos varios fruto en ocasiones de derivas conceptuales ajenas al origen de nuestra Institución, así como también a salvo de prejuicios a la moda de corrientes de pensamiento radicalizadas e incapaces de abstraerse para ver en el símbolo su acepción más amplia.

  Los arriba citados mensajes de cambio interno profundo, de elevación ética y moral, se mantienen expuestos de forma constante en todos los rituales de los Modernos, con independencia de la variopinta exteriorización formal propia de usos locales y de formas culturales al uso. Dicha grandeza referida a la atemporalidad de los rituales ha sido en ocasiones incomprendida por mentes pequeñas, confusas o manipuladas, calificando simpáticamente en ocasiones de “ritualócratas” a aquellos curadores, no de la forma, sino del fondo contenido ritual, aquel que hace posible que se abra la puerta de acceso que permite el tránsito de lo íntimo a lo grupal mediante el intercambio vivencial del conjunto de ideas simbólicas allí expuestas y contenidas. Así pues, cuando la mutación elimina el símbolo y el mensaje de origen, deja entonces de ser lo que fue, y deviene otra cosa, no sé si mejor o peor, pero distinta. Está en aquellos conocedores de dichas evoluciones y cambios, la responsabilidad de opinar y alertar si así se viere preciso, evitando que se dé gato por liebre y el pretender en contrapartida rescatar y recuperar los valores originales del Rito Moderno o Francés que lo fueron de la Orden cuando la Masonería carecía de adjetivos calificativos en sus prácticas rituales. Bien refiere sabiamente el Ritual Luquet de 1745 respecto al uso de la Razón que debemos reivindicar los Maestros, trazando y ejecutando nuestras acciones sin temor alguno a exteriorizarlas públicamente, cualidad extrapolable a la reivindicación que hacemos para el Rito Moderno y su buena práctica en cuanto a sus vehículos rituales.
  A propósito de la riqueza de su contenido, abundemos un poco en este elemento simbólico para hoy propuesto: la Plancha de Trazar.

  El Rito Moderno obvia y oportunamente vincula a la luz como símbolo del conocimiento, y concretamente a sus Tres Grandes Luces en sus distintas acepciones, directa, indirecta o articulada en Logia a través de la figura del Venerable. De modo también exquisito (magistral, diría yo) nos expone el símbolo/concepto de Joyas de la Logia que ya se nos muestra en una divulgación londinense de 1724[1] donde aparece el Diamante con toda su riqueza simbólica derivada que intentaremos analizar en otra ocasión.

  Respecto a las Joyas de la Logia, diríamos que son los emblemas preciosos de gran valor Moral y Ético, el cómo, porqué y para qué de nuestra pertenencia a la Orden y de su finalidad en definitiva. Es este Tesoro el que, por regla general, los catecismos dividen en dos partes denominadas Joyas Móviles y Joyas Inmóviles, las cuales a su vez se nos presentan con una descripción material y, otra, con un significado simbólico y moral que es, en definitiva, su asociado íntimo al abrigo del cual cada masón debe interiorizar sus reflexiones oportunas y propias.

  La descripción y desarrollo de la Joyas se nos aparece extensamente en los Rituales de Segundo Grado a lo largo del Siglo XVIII, un estadio que en sus orígenes fue terminal y culmen de la realización masónica que, posteriormente con la aparición del Grado de Maestro, cedió parte de su protagonismo originario al mismo, si bien mantuvo en los rituales posteriores a 1730[2] una riqueza amplia y un fuerte nivel de ejemplaridad en cuanto a la función misma de "enseñante" por parte del Compañero hacia los Aprendices, aspecto muy relegado en la actualidad y que ha hecho del Segundo Grado una etapa poco comprendida en toda su amplitud vivencial y responsabilidad inherente.

  Así pues, si nos proponemos adentrar en lo que es la Plancha de Trazar, ese instrumento Magisterial solo puede ser comprendido en el conjunto acompañado del resto de Joyas Inmóviles, siendo éstas representación del Estado Humano, desde lo más burdo y grosero, hasta su opuesto, es decir, desde la Piedra Bruta, pasando por la Piedra Cúbica en Punta, hasta la Plancha de Trazar. Las Joyas Móviles, escuadra, nivel y perpendicular, corresponderían a las características de nuestras acciones, interacción y actitud espiritual en aras de transitar por los estados anteriores. No es menester, por tanto, llevar a cabo un gran esfuerzo de comprensión para llegar a entender que el instrumento Magisterial por excelencia representa un Modelo Público ejemplar en cuanto a sus acciones y con un uso pleno de Razón, Sabiduría y Virtud. Pero ¿qué implicación directa supone la anterior afirmación? ¿Dónde radica la pericia que debe tener todo Maestro para el uso preciso de esta Herramienta propia y que le define?
En primer lugar basarse en la realidad vital de un permanente estado de latencia y transición entre el Aprendiz, Compañero y Maestro, contenido en su experiencia y naturaleza humana, cual humilde plano utópico que se construye y destruye permanentemente, sin cesar, como consecuencia de la dualidad inherente a su misma esencia humana, y por consiguiente animal, un ser que aspira cognitiva y espiritualmente a elevarse hasta un modelo perfecto, pero al que solamente se aproxima de manera perfectible, con perseverancia y haciendo uso de otra herramienta esencial de aplicación individual y colectiva: el Amor.
Así, y solamente así, el Maestro se da cuenta que la cumbre del progreso iniciático no es otra cosa que vivir la realidad, una realidad plena y armónica que existe y habita en nuestro propio interior, en lo más profundo de nuestra Piedra: nuestro Diamante por exteriorizar.

Joaquim Villalta, Vª Orden, Gr.·. 9, 33º
M.·. I.·.
Director de la Academia Internacional de la Vª Orden - UMURM
Gran Orador del Sublime Consejo del Rito Moderno para el Ecuador
Miembro Honorario del Soberano Grande Capítulo de Cavaleiros Rosa-Cruz de Portugal - Gran Capítulo General del Rito Moderno y Francés de Portugal
Miembro Honorario de la R.·. L.·. Estrela do Norte nº 553 del Grande Oriente Lusitano
Gran Canciller para Europa del Gran Oriente Nacional Colombiano
Miembro Honorario del Gran Oriente Tradicional de Bolivia
Miembro Honorario del Soberano Supremo Consejo del Grado 33 para el Escocismo de la República del Ecuador
Miembro Honorario del Supremo Consiglio del 33º ed Ultimo Grado del R.S.A.A. per l’Italia e sue Dipendenze
Miembro del Suprême Conseil du 33e Degré pour la France du Rite Ancien et Accepté (Cerneau's Rite)
Presidente de la Confederación Internacional de Supremos Consejos del Grado 33º del R.·. E.·. A.·. A.·.
Muy Poderoso Soberano Gran Comendador del Supremo Consejo del Grado 33º para España del Rito Antiguo y Aceptado





[1] “Le Grand Mystère des Franc-Maçons découvert” (Londres, 1724)
[2] “Masonry Dissected”, Samuel Prichard (Londres, 1730)