Souveraines.
différentes structures.
de relations entre ses membres ; elle est également, à travers son Chapitre itinérant l’Arche d’Alliance, un développeur de la pratique des Ordres du
Rite Français de Tradition.
C’est tout naturellement qu’elle a désiré élargir ses échanges en se
tournant vers l’Union Maçonnique Universelle du Rite Moderne, dans une
correspondance d’objectifs et avec une volonté de fortifier ses relations
fraternelles.
Nous vous proposons la planche d’une de nos soeurs, présentée au 1er
Ordre dans son Chapitre, sur un des thèmes premiers, dont l’importance
n’aura échappé à personne.
Jean-Pierre Duhal
Président de l’ASCRF
Membre de l’Académie Internationale du Ve Ordre
de l’Union Maçonnique Universelle du Rite Moderne
LA CAVERNE
Impossible de parler de la caverne, sans faire un détour par quelques unes
célèbres parmi d’autres, car elle figure dans les mythes d'origine, de
renaissance et d'initiation de nombreux peuples.
*A tout seigneur tout honneur, la grotte de la nativité. Citée dans certains
écrits bibliques, elle se situe dans les collines
de Bethléem où Jésus serait né, d’après un témoignage de Saint Justin le
Martyr, apologète et philosophe au 1er siècle. Jésus, par sa naissance apporte à
toute l’humanité le processus de sa régénération, la conduisant à son salut.
« Je suis le chemin, la vérité et la vie, nul ne va au père que par moi ».
(Evangile selon Saint Jean, XIV-6 ). D’où le symbolisme fort de la caverne,
dans laquelle commence toute initiation.
*La caverne des 7 dormants d’Ephèse, persécutés en tant que chrétiens
par l’empereur romain Dèce qui les fait emmurer vers l’an 250 alors qu’ils
étaient endormis de façon mystérieuse, et qui se sont réveillés vers l’an 418
au hasard de la découverte de la grotte par un maçon, sous le règne de
l’empereur Théodose II, qui voit là une preuve de la possible résurrection
des morts.
*La caverne de Hîra au nord ouest de la Mecque, où selon la tradition
musulmane, Mahomet aurait reçu les premières révélations de Dieu. Elle
symbolise alors un lieu de rencontre avec le Divin, le sacré, le surnaturel.
*La caverne d’Ali Baba qui symbolise alors un lieu secret rempli de
richesses.
* La caverne de Trophonios en Béotie Trophonios et son frère Agamède
étaient d'habiles architectes, qui construisirent le temple d'Apollon à
Delphes. Ils construisirent aussi un bâtiment pour Hyrieus, roi d’Hyria en
Béotie, afin renfermer son trésor.
Mais les 2 frères se réservèrent un moyen secret d'y entrer et périrent tous
les deux, en voulant dérober les richesses d'Hyrieus. Cette caverne fut le
siège d'un oracle fameux que l'on consultait au milieu d'un appareil
effrayant. Ceux qui avaient consulté l'oracle de Trophonios en
remportaient un fond de tristesse que rien ne pouvait vaincre, et qu'ils
conservaient le reste de leur vie.
* Incontournable, la caverne de Platon. Pour lui, elle est l’image de notre
monde, un lieu d’ignorance, de souffrance et de punition, où les âmes
humaines sont enfermées et enchaînées par les dieux. La lumière indirecte
qui éclaire ses parois, indique la route que l’âme doit suivre pour trouver
le chemin de la sagesse et de la justice. Toujours pour Platon, la caverne,
cavité sombre aux limites invisibles, est un symbole de l’inconscient et de
ses dangers souvent inattendus. Car le passé inscrit au fond de chaque
être, ne disparaît pas. Même reniées, les réalités du passé continuent de
tourmenter l’être qui se réfugie au fond de la caverne, c'est- à-dire
l’inconscient. L’âme doit sortir de la caverne pour contempler le vrai
monde des réalités.
*Dans la mythologie grecque, la quête d’Orphée à la recherche
d’Eurydice, et sa descente aux enfers, s’apparente aux épreuves
initiatiques maçonniques liées aux 4 éléments. Il pénètre dans une caverne
au nord de Thrace, c’est l’épreuve de la terre, puis chemine dans une
galerie pleine de courants d’air, c’est l’épreuve de l’air, il arrive au bord du
Styx qu’il devra traverser, et c’est l’épreuve de l’eau, et enfin, il doit
amadouer Cerbère pour arriver jusqu’à Hadès dieu des enfers et
Perséphone son épouse, et c’est l’épreuve du feu.
Notons la présence du chien Cerbère, en analogie avec celui de
l’inconnu. Quelque soit la légende dans laquelle elle est citée, la caverne se
situe dans les entrailles de la terre, la « matéria prima », symbole universel
de la matrice maternelle.
C’est là où se trouve la « pierre cachée » des alchimistes, le fameux
V.I.T.R.I.O.L. Au grade d’élu secret, en franc maçonnerie, que représente
cette caverne? L’entrée des enfers, l’inconscient, ou le seuil de l’initiation,
comme l’a été le cabinet de réflexions lors de notre entrée dans l’Ordre? Pourquoi
et pour quelle raison suis-je dans cette caverne ?
La raison première est la suite de la mort d’Hiram, et de la recherche
d’Abibala, assassin présumé d’Hiram ! Un tirage au sort m’a désigné, moi
Joaben, pour me trouver à la tète de huit frères pour partir à la recherche
des trois scélérats, instigateurs du crime, trois compagnons dont le chef a
pour nom Abibala, qui se traduit par meurtrier du père, et qui est leur
ainé. Après concertation avec le Roi Salomon, les neuf Elus dont je fais
partie, après avoir prêté serment de venger la mort d’Hiram, et après une
longue marche en pays inconnu, nous rendons prés de Jappa, dans une
carrière au bord de mer, dénommée Ben-Acarr.
Deux hommes, pris de peur en voyant notre groupe, se jettent dans une
fondrière ou ils meurent ! Ce sont 2 des 3 Compagnons assassins
d’Hiram. Un chien rode, c’est celui de l’inconnu qui a révélé à Salomon la
cachette des assassins.
Il n’est pas là par hasard.
« Ce qui est hasard à l’égard des hommes, est dessein à l’égard de Dieu ».
Bossuet. « Hasard est le nom que Dieu prend quand il ne veut pas qu’on le
reconnaisse ». Albert Einstein
Le chien est le symbole de l’intuition, et rappelle que le moindre indice
sert souvent à déceler le coupable. Il peut représenter la volonté divine
que « le crime ne reste pas impuni », en me guidant vers la cachette
d’Abibala, sans pour autant représenter une vengeance aveugle et
personnelle.
Dans son rôle de gardien inflexible, le chien peut représenter la
conscience d’Abibala, meurtrier d’Hiram, horrifié par son crime, ne
voyant son salut que dans la mort, et faisant de lui l’outil de son
châtiment. Le chien de l’inconnu, c’est la force qui me pousse, moi,
Joaben vers la caverne, qu’elle vienne de l’au-delà ou de la conscience
d’Abibala, cette force qui me permettra de retrouver l’assassin. Ce chien,
donc, me conduit à l’entrée d’une caverne, et malgré l’étroitesse, la pente
rude, et un escalier de neuf marches taillé dans le roc, je parviens à me
glisser à l’intérieur. Une lampe s’y trouve et éclaire les lieux. Sa présence
est très importante, impossible de parler de la caverne sans parler de la
lampe. Un troisième homme s’est réfugié dans la caverne, c’est «Abibala».
Lorsqu’il me voit apparaître, moi, le bon maçon, il prend conscience de
l’horreur de son crime, et ne peut étouffer le sentiment de culpabilité, pris
de panique, il se tue par un coup de poignard dans le coeur! La caverne a
permis aux Maîtres Elus de ne pas accomplir de vengeance, car les
assassins se sont fait justice par eux-mêmes, un peu par peur, un peu par
désespoir.
La caverne représente l’inconscient, elle symbolise l’exploration du moi
intérieur, primitif, refoulé dans les profondeurs de l’inconscient. Entrer
dans la caverne, c’est faire retour à l’origine, et de là, tenter l’ascension.
Nous avons déjà étudié un symbolisme voisin lors de l’étude du cabinet de
réflexion au grade d’apprenti. La caverne est le lieu de passage de ceux qui
cherchent la vérité.
L’escalier de 9 marches qui mène à la caverne, rentre dans la terre, il
figure donc la progression vers le savoir occulte et la connaissance des
profondeurs de l’inconscient. S’il s’élevait vers le ciel, il s’agirait de la
connaissance du monde apparent.
Ainsi, tant la caverne que l’escalier, visent la connaissance de
l’inconscient, afin de permettre la naissance d’un homme nouveau. En
pénétrant à l’intérieur de la caverne l’élu accède au monde souterrain,
ténébreux de sa conscience.
La caverne, lieu mythique de l'humanité est marqué du sceau de
l’ambivalence; à la fois un lieu de refuge mais aussi d'effroi. Le symbole de
cette caverne, démontre bien que les idées sombres, néfastes,
dérangeantes, contraires aux règles et aux principes pris lors des divers
engagements maçonniques, ne peuvent apporter que tristesse, désolation,
et mort du Maçon qui faillit à ses engagements.
Mais revenons à la Lampe, elle ne fait pas qu’éclairer Abibala, elle
m’éclaire aussi, et par le biais de cette lampe, je suis le reflet de son image
déchue, c’est bien là que doit porter notre réflexion.
Moi, Joaben, mandaté par Salomon pour « venger » le crime, je ne suis pas
l’instigateur d’une vengeance qui n’aurait aucun sens ici, mais bien pour
expliquer que le coupable doit, par une introspection personnelle, un
retournement intérieur, prendre conscience de sa conduite.
La Lampe est un message donné par le G. A. D. L.U qui, loin de nous
demander une vengeance aveugle, laisse le libre arbitre à chacun d’entre
nous pour rétablir un juste équilibre, un juste retournement, mais ou
l’Elu Secret ne se salit pas les mains, et si d’aventure cela était, la source
est un symbole fort de purification !!
Il me faudra alors sortir de cette caverne, pour avoir accès à une source
d’eau fraiche qui me permettra de me rafraichir et faire mes ablutions,
c'est-à-dire, symboliquement, redevenir originel et retrouver une pureté
perdue !
Cela prouve s’il en était besoin, que chaque membre d’une société doit
être intègre, sans volonté de possession malsaine ou autoritaire, et l’image
que nous donnent les trois mauvais compagnons est un symbole fort vis-àvis
d’un Elu Secret.
Nous ne sommes plus ici au mythe de la caverne de Platon. En effet, dans
la définition de Platon, les esclaves voient leurs projections sur le mur de
la caverne, mais ignorent comment est
l’extérieur de la caverne. Ici, c’est exactement le contraire, et Abibala, qui
vient de tuer Hiram pour lui extorquer ses secrets, retourne à la caverne
comme pour expier ses méfaits indignes d’être vus au grand jour, mais
impossibles à cacher à sa conscience, à la Lampe !
Il ne peut que se donner la mort, puisque non respectueux des serments
pris, la venue et la vue de Joaben ne peuvent que réveiller un sentiment
d’horreur vis-à-vis de lui-même ! Coupé de ses Frères, sa conscience lui
dicte alors ce geste funeste. Cette allégorie marque nos esprits, et une
analyse sincère démontrera que nous pouvons faillir parfois, et que cette
lampe qui nous éclaire, qui veille et révèle parfois nos mauvais penchants,
doit être constante et rester éclairée à l’intérieur de chacun de nous.
Mais cette image est celle de tout Maçon qui, tout au long de sa vie et dans
tous lieux, doit être respectueux des règles et devoirs qu’il a juré de
respecter ! Dès lors où les règles sont respectées, il n’y a pas lieu de
vaincre Abibala, puisque, dans un monde de pureté et d’intégrité, Abibala
ne saurait exister.
Mais, si Abibala existe, le crime ne peut être impuni, la conscience est un
juge inflexible, et sans un pouvoir légitime, la vengeance est criminelle,
nous dit notre rituel !!!
En effet, la vengeance réclamée à l’origine, n’est somme toute que celle
définie par le Roi Salomon, belle allégorie et totale similitude avec les
engagements pris sur la chaire du Très Sage, qui laisse entrevoir que, si le
crime est répréhensible, il peut, par une introspection sincère, désaliéner
un vrai repenti !
Dans l’évolution de notre propre construction, notre esprit s’emprisonne
d’abord au « Centre de la Terre », là où la « lampe de la raison » éclaire la «
Vérité ». Avec ce flambeau que nous portons maintenant en nous, nous
pourrons entrevoir ce qui n’est pas visible, en regardant au-dedans de
nous, rappelant ainsi, tout comme la Loge qui n’est éclairée par aucune
fenêtre, que l’unité n’est visible que du dedans.
Nous pouvons en déduire que tout au long de notre parcours initiatique,
qui commence à notre re-naissance par notre entrée dans un monde
nouveau, nous serons guidés, éclairés, sur le chemin qui doit nous
conduire vers l’intérieur de ce monde, vers notre centre sacré. Ce chemin
est un chemin de lumière qui va vers l’intérieur, car c’est au plus profond
de notre être, que l’on découvre cette flamme qui brille, cette flamme qui
nous a été transmise à travers la « chaîne des frères et des soeurs».
Suivre ce chemin, c’est aller à la recherche de nous-mêmes, dans notre
rapport avec nos semblables et avec l’Univers, à la recherche d’un idéal. La
lampe, c’est ce qui nous permet de nous rencontrer avec nous même.
Et si cette Lampe est le G.A.D.L.U, je suis persuadé qu’elle brille en nous
depuis bien longtemps, bien avant notre initiation, depuis notre premier
jour, depuis le premier jour du premier homme. A nous d’entretenir sa
flamme.
Mars 2020
Monique DURET M.·.E.·.S.·.
Souverain Chapitre Sirius - ASCRF
Vallée de Marseille