REMARQUE LIMINAIRE
on objectif en rédigeant ce balustre
n’est certes pas d’y consigner tous les enseignements et connaissances de ce
grade, ce qui relève du travail personnel de chacun et du travail collectif en
chapitre. Et bon nombre de livres permettent à chacun de trouver réponse à ses
questions et d’approfondir ainsi le contenu du grade.
Ne s’agissant pas de réécrire de nouveau
ce qui existe, je souhaite bien plus ouvrir des pistes de réflexion en situant
le cadre du grade et en mettant en exergue certains points symboliques qui nous
échappent parfois.
Je tiens aussi à préciser que je
respecte toutes les convictions religieuses, philosophiques ou spirituelles de
chacun qui ne regardent finalement que la conscience de chacun. Il reste que
les Ordres de Sagesse de notre rite sont fortement empreints des traditions
biblique et chrétienne, ce qui fit écrire à un de mes prédécesseurs que le rite
moderne français était de forme chrétienne. Je reste profondément attaché à
accorder l’importance d’un symbole au signifié et non au signifiant : si
un enseignement bouddhiste ou musulman me plait, je peux l’accepter sans
cependant me convertir à cette religion. Je pense qu’il faut savoir dépasser le
cadre allégorique pour ne retenir que la substantifique moelle.
Ainsi, le conte des 3 petits cochons
veut, en sa finalité, nous inciter à construire notre vie sur du solide même si
c’est plus lent et demande plus d’efforts. Celui qui s’arrête à s’interroger si
les 3 petits cochons ont réellement existé ou si des cochons peuvent bâtir une
maison perd non seulement son temps mais le bénéfice de l’enseignement.
Qu’un enseignement soit qualifié de
chrétien voire de christique n’exclut nullement qu’il ne puisse être suivi par
un bouddhiste, un musulman voire un athée. De même, comme le soulignait notre
TCF Fabrizio, la bible ou le GADLU font partie de notre tradition maçonnique
française : on ne peut les soustraire mais il appartient à chacun le droit
d’y réserver l’interprétation qu’il souhaite.
Je laisse donc à chacun de retenir de
la tradition que j’expose ce qui lui convient ou de l’adapter à sa propre
évolution et à ses convictions voire même de la refuser. Chacun reste libre et
maître de son initiation.
De mon côté, je demanderai aux FF\ et au SS\ se sentant visés par
certaines de mes incompréhensions personnelles que je pourrais exposer. Elles
ne sont finalement nullement des critiques stériles mais des invitations à
l’expression de positions différentes des miennes.
Alain DRUART
Vème Ordre – grade 9
Grand Conservateur du
GCGMB
CADRE CONTEXTUEL
du IIIème ORDRE de SAGESSE
omme son nom l’indique, le IIIème
Ordre de Sagesse ouvre la porte de la chevalerie maçonnique aux récipiendaires
et je ne peux, à ce sujet, que vous conseiller la lecture du livre de notre TCF
Pierre MOLLIER.
Le « Chevalier d'Orient » fut ,jusqu'au
milieu du XVIIIème siècle, considéré comme le nec plus ultra de la
tradition maçonnique française et grade ultime.
Le grade de Chevalier d'Orient synthétise toute une
série d'éléments empruntés aux différents grades « chevaleresques », qui, dans
la hiérarchie actuelle du Rite Ecossais Ancien et Accepté, précèdent le 18e
degré, celui de Rose Croix, et contient l'héritage des multiples grades chevaleresques
qui ont fleuri au XVIIIème siècle.
Il est basé sur une légende d'Ordre.
Résumons :
Les « maçons libres », derniers défenseurs de Jérusalem
lorsque la Ville Sainte fut prise par Nabuchodonosor furent déportés à Babylone
pendant septante ans. Cyrus eut alors une vision qui lui commandait de « rendre
la liberté aux captifs ». Zorobabel les ramène, mais rencontre « un obstacle »
aux bords du « fleuve qui sépare l'Assyrie de la Judée », il fait construire un
pont, mais les « peuples de l'au-delà » l'attaquent au passage, il les vainc,
grâce à l'aide « des braves maçons qui le suivaient ». Sur le site du Temple,
avaient subsisté en échappant à la captivité, « quelques Grands Elus » ; ils
avaient trouvé l'entrée de la « voûte sacrée » et la « lame d'or sous la pierre
cubique qu'ils détruisirent » et ils transmirent « leurs mystères par la seule
tradition ». Ananias qui était à leur tête reconnaît Zorobabel comme chef et le
Temple est reconstruit.
Après la destruction du Second Temple par « les
Romains », « quelques-uns des Architectes restèrent presque sur les lieux » et
en conservèrent les secrets. D'autres, d'abord retirés « au désert », les
rejoignirent. Ils fondèrent un « hospice sur le lieu même où le Temple avait
été détruit en faveur des pèlerins » et devinrent « un ordre religieux ».
Apparut Pierre l'Ermite « fanatique obscur, mais entreprenant » qui « excita
cette guerre si funeste connue sous le nom de Croisades ». A la nouvelle de son
arrivée, « d'anciens militaires, retirés pour la plupart dans les déserts de la
Thébaïde » rejoignirent les Architectes. Ils avaient tous pour but le
rétablissement du Temple et « déguisèrent sous les simples apparences d'une
architecture spéculative, un point de vue glorieux ». Ils rejoignirent les
armées Croisées, se donnèrent des chefs militaires, fixèrent un « formulaire
dont les symboles et les allégories pris de la construction du Temple les
ramenaient toujours au véritable but ». Pour éviter toute surprise, « ils
choisirent des mots, signes et attouchements pour se reconnaître », adoptèrent
le titre de Maçons Libres et se joignirent aux Croisés « de qui ils seront
accueillis et distingués ». Les Architectes qui avaient édifié l'hospice
restèrent actifs, « prirent les armes et, sous un chef de bande érigé en Grand
Maître », rejoignirent aussi les Croisés.
Après cette guerre, « ils s'agrandirent, puis furent
anéantis ». Pendant ce temps, 81 d'entre eux passèrent en Suède et initièrent à
leurs secrets l'archevêque d'Upsal. Plus tard, 81 autres chevaliers les
rejoignirent, le prélat renferma leurs secrets dans un tombeau de marbre scellé
de quatre sceaux.
Après la conquête de la Terre Sainte par les
Egyptiens, les Architectes abandonnèrent leur pays et allèrent chercher
ailleurs « de nouveaux établissements ». Et le rituel se conclut par une
invitation faite au postulant de construire le Temple avec des « matériaux
mystiques ».
Le rituel du grade comprend deux épisodes : dans
la « salle d'Orient », Cyrus rend « la liberté aux captifs » à la demande de
Zorobabel. Dans la « salle d'Occident », ledit Zorobabel est reconnu comme apte
à diriger les travaux de reconstruction du Temple. Tout ceci reste très
biblique. Pour nous maçons, nous pouvons donc en déduire que Zorobabel succède
donc quelque peu à notre maître Hiram.
Nous pouvons faire le constat à ce
grade que nous arrivons au troisième mythe depuis notre entrée dans
l’ordre :
1. Nous avons vécu le mythe
de la construction du temple de Salomon avec les grades d’apprenti et de
compagnon ;
2. Ensuite, le mythe d’Hiram
avec le grade de maître et celui du Ier Ordre ;
3. Enfin, le mythe
chevaleresque avec les IIIème et IVème Ordres.
Ainsi,
le IIIème Ordre fait référence à la fois au mythe de construction du
temple qu’à celui de la chevalerie, véritable charnière entre les deux.
CHEVALERIE TEMPLIERE ?
Lorsque nous évoquons la chevalerie
dans le cadre franc-maçonnique, nous songeons immédiatement aux chevaliers de l’Ordre
du Temple, les templiers.
Sans entrer dans la polémique sur les
origines historiques de notre Ordre, nous devons cependant accepter le fait qu’
en Ecosse, il fut trouvé des manuscrits maçonniques bien antérieurs à la
constitution de la Grande Loge, de la Grande Loge de Londres et de Westminster
en 1717. La plus ancienne loge maçonnique connue dont on puisse clairement
établir qu'elle était structurellement distincte de la corporation locale de
maçons opératifs fut celle de Mary's Chapel, fondée en 1599, sous l'autorité de
William de Saint Clair, à Édimbourg en Écosse. Et l’Ecosse est reliée sans
conteste avec l’histoire des templiers : la légende attribue à cette terre
d’avoir été le lieu de refuge de plusieurs templiers suite à l’arrestation des
membres de l’Ordre en France. Des édifices comme Rosslyn Chapel évoque ces
échanges entre Chrétiens, francs-maçons et templiers.
Comme je l’ai souligné en un morceau
d’architecture, nul, aujourd’hui ou au XIIIème siècle, ne peut
revendiquer une quelconque filiation historique et légitime avec l’Ordre du
Temple. Elle se limite à une « filiation spirituelle ».
Nul ne contestera que la tradition
templière est omniprésente au sein du Rite Ecossais Rectifié et
particulièrement en son Ordre Intérieur des Chevaliers Bienfaisants de la Cité
Sainte,
vocable qui, pour tous, signifie chevalier du Temple.
Le Rite de la Stricte Observance
(templière), dont nous connaissons aujourd’hui un certain retour, fait
référence directe à la tradition templière.
Le Rite Ecossais Ancien et Accepté,
en son grade de Chevalier Kadosh (30ème), ne soulève aucune
objection sur la référence à l’Ordre du Temple bien que fortement orienté sur
une vengeance et
non sur la tradition chevaleresque.
Ces trois rites poussent à accepter
le fait que quand on évoque un caractère chevaleresque à la franc-maçonnerie,
on sous-entend la chevalerie templière et nulle autre.
Notons à ce sujet que d’autres rites
non pratiqués en nos régions sont tout aussi explicites : ainsi le Rite
Suédois ou, aux USA, le Rite d’York. Le Rite d’York né en Ecosse et ensuite
exporté par les maçons irlandais aux USA se termine par le grade de chevalier
templier. Il est à noter, que selon son rituel, le franc-maçon passe du Temple
de Salomon (de l'Ancien Testament) qu'il rebâtit en recevant la gnose en vue
d'un temple à la portée plus chrétienne que poursuivent les commanderies. Ceci
rencontre notre IIIème Ordre de Sagesse.
Revenons à notre rite et au IIIème
Ordre de Sagesse.
En lisant le discours historique – et
pour le peu qu’on sache lire entre les lignes – la référence à l’Ordre du
temple est évidente
bien qu’en nul Ordre de Sagesse, elle ne soit clairement indiquée. Déjà, le nom
même du grade, Chevalier d’Orient, évoque le chevalier templier.
Que nous soyons du Rite Écossais
Rectifié, du Rite Écossais Ancien et Accepté ou encore du Rite Français, notre
initiation maçonnique reste identique et comporte les mêmes jalons. Ceux-ci
sont sans doute moins dissimulés au sein du RER qui dès le départ renseigne le
profane sur l’objectif maçonnique.
LA LIBERTE
a liberté reste un des thèmes
fondamentaux du IIIème Ordre illustrée ici par un épisode très
biblique de la libération des captifs. LDP, trois initiales pour, selon le rituel, liberté de
passer (ou de passage) qui se situe avec le passage du fameux pont par les
captifs libérés.
La liberté suit la captivité et le
mot de passe du grade soit Yaavorou hammaim, qui signifie : ils
passeront les eaux, n’est pas sans évoquer un autre épisode biblique, celui de
Moïse qui délivre le peuple juif du joug égyptien.
La liberté est invoquée dès le début
du rituel
et avec un signe de relever la pointe de l’épée dans un geste rapide.
Et, en effet, cette liberté ne s’acquiert que par un combat avec l’épée et ne
s’acquiert qu’après un combat où nous perdons des trésors, soit la liberté
exige concessions et sacrifices.
Et de nouveau, l’accent est mis sur
le GADLU qui ordonne cette remise en liberté, cette délivrance, au travers du
songe de Cyrus.
Sous-jacent, le rituel nous enseigne
de quelle liberté il s’agit pour nous francs-maçons : la liberté de
travailler, certains préciseront la liberté de penser. Il s’agit de
la liberté de travailler à l’édification – la reconstruction – du second temple.
C’est donc une liberté bien définie.
Dans une réponse de Zorobabel, il
assignera comme autre vertu de l’Ordre l’égalité
et finalement une autre réplique du 1er Surveillant, la fraternité .
Liberté, Egalité, Fraternité … sont
en effet les principes essentiels de notre Ordre et constituent nos lignes de
conduite pour le travail maçonnique.
Il reste assez étonnant que, quasi au
terme de notre parcours, nous revendiquions une liberté de travailler alors que
depuis notre réception d’apprenti, ce travail fait partie de notre vie
maçonnique. Mais, selon le rituel, nous étions captifs soit privé de
travail ou privé du travail selon ce que nous le concevions ? Le
travail de l’apprenti ou du compagnon s’effectue sous la direction et
l’instruction du maître et celui du maître sous celles de l’architecte,
devons-nous nous en libérer ? Autant de questions …
Si on considère que dans les degrés
symboliques, nous travaillions à la construction du temple de Salomon, ce
temple fut détruit et nous nous devons de le reconstruire. Si on considère que
le temple, c’est symboliquement le maçon lui-même en sa phase initiatique, nous
connaissons donc aussi cette destruction, cet anéantissement et nous nous
devons de nous reconstruire. En écrivant ces lignes, le poème de notre TCF
Rudyard KIPLING résonne en ma tête : « Si tu peux voir détruit
l’ouvrage de ta vie, et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir » …
Si devenir franc-maçon reste une chose relativement facile, devenir un initié
en est une autre bien plus difficile qui nécessitera multiples combats contre
nous-mêmes pour nous libérer de notre captivité du monde profane, engendrera
renoncements ou pertes de nos avantages profanes. C’est un combat de tous les
jours.
Pour la première fois, l’expression
de « maçon libre » est évoquée en nos rituels. Nous restons
cependant assez éloignés de ce que le TCF Léon CAMPION nomme la vocation libertaire
de la maçonnerie.
Il ne s’agit nullement d’anarchisme
car notre liberté à ce grade reste parfaitement cadrée et centrée sur le
travail de reconstruction du Temple et sur nos devoirs. La liberté aussi a ses
règles.
Ceci me fait penser à une expression
souvent répétées en nos loges, celle d’un maçon libre dans une loge libre
qui ne signifie point comme certains voudraient le faire croire que tout est
désormais permis et qu’on peut faire n’importe quoi. La liberté n’exclut point
le respect des devoirs et obligations. « La liberté est le droit de
faire ce que les lois permettent. »
La liberté accorde cependant une
prérogative importante. Contrairement à la captivité qui comporte multiples
contraintes et impositions, la liberté offre la possibilité, le droit, du choix
personnel. Ce choix relevant de notre libre-arbitre et de notre conscience.
La liberté a un prix qu’il faut
assumer !
« Tout ce qui augmente la
liberté augmente la responsabilité. »
Je me souviens à ce sujet, alors que
j’étais visiteur de prison, d’un prisonnier qui comptait les jours pour sa
libération mettant celle-ci sur un nuage doré. Arrivé enfin à
l’échéance, il fut libéré et heureux de l’être. Trois jours après, je fus
étonné de le revoir sous les barreaux. Paradoxalement, j’appris que le
surlendemain de sa libération, il avait démoli la vitrine d’un bijoutier, volé
quelques bijoux puis s’était assis devant sur le trottoir pour attendre la
police.
Il me déclara que finalement, en
prison, il avait la sécurité, qu’on lui donnait à manger et un lieu pour
dormir.
Et nous, maçons, ne sommes-nous pas
parfois comme cet homme, préférant notre captivité rassurante à une liberté
initiatique qui nécessite effort, travail et renoncement ? Empreints de
liberté, sommes-nous prêt à l’assumer ?
L’ EPEE ET LA TRUELLE
u IIIème ordre, comme
chevalier mais aussi maçon libre, nous travaillons avec l’épée et la truelle,
signifiant que nous sommes à la fois défenseurs et constructeurs du temple.
L’épée reste bien entendu le symbole
premier de la chevalerie que nous avons découvert dès notre entrée en loge
symbolique. Associée au maillet, elle est en effet portée par le Vénérable
et toutes nos consécrations de grades furent effectuées par l’épée .
Rappelons qu’aux origines de notre Ordre, tout maçon portait l’épée.
A ce sujet, nous remarquerons qu’en
notre Rite Français, l’épée de loge ou épée du Vénérable est droite et non
flamboyante comme en d’autres rites.
Ceci est également le cas au Rite Ecossais Rectifié. La symbolique devient donc
différente selon l’un ou l’autre rite.
L’épée flamboyante, c’est l’épée des Keroubim
;
elle relève donc d’un pouvoir ou d’une puissance émanant de Dieu : la
consécration du récipiendaire se fait donc dans une dimension verticale où le
Vénérable est, en quelque sorte, la main du GADLU. Il ne s’agit donc ici
nullement de ce que nous nommons un adoubement.
A contrario, l’épée droite
relève de la chevalerie, soit de l’humain et non du divin, de la reconnaissance
par les pairs dont le Vénérable est le représentant. La dimension de la
consécration reste sur un plan horizontal tel que le définit l’adoubement.
Le Rite Français tout comme le Rite
Ecossais Rectifié accentuent le fait qu’on est créé maçon (quelque soit le
grade) par la reconnaissance de ses pairs, ce qui reste bien sur le plan humain
de l’horizontalité.
L’épée au sens noble et initiatique
du terme symbolise la Conscience et la Connaissance spirituelle, métaphysique
ou philosophique… L’épée renvoie au travail sur soi, au dépassement de soi et
au Connais-toi toi-même attribué à Socrate… Aussi, dans le cadre de notre
grade, elle nous indique que c’est souvent contre nous-même que nous aurons à
nous défendre.
L’épée évoque ainsi une pensée
discriminatoire et spéculative fondée sur l’acuité intellectuelle et
analytique. L’épée symbolise la faculté de discernement et la clarté d’une
l’intelligence aiguisée. Sur le plan spirituel, il s’agit des facultés acquises
pour obtenir une conscience claire et intuitive. Elle symbolise également le
Verbe.
La truelle nous fut révélée au grade
précédent comme instrument de notre purification soit finalement de notre
reconstruction individuelle. Elle devient à ce grade un outil de (re)construction
collective.
Un ancien rituel disait :
« La truelle est l’outil par lequel l’œuvre du constructeur s’achève et
devient parfaite ». Elle était, de ce fait, liée au pilier de la
beauté. Signalons aussi qu’une ancienne instruction compagnonnique faisait de
la truelle le symbole de la tolérance.
Le rituel de Maître Ecossais de Saint
André
stipule ceci :
« Je vous arme aussi de cette épée, dont vous vous
servirez pour votre défense et pour celle de vos Frères , tandis que vous vous
servirez, de l'autre main, de la truelle que je vous confie pour le travail auquel vous vous êtes engagé
; mais prenez garde de ne jamais abuser de l'une ni de l'autre et de vous
souiller par aucune chose qui serait injuste devant le Juge Suprême de toutes
vos pensées et de toutes vos actions. »
Soulignons qu’en la sapience
d’Hermès, l’épée dite des philosophes est d’une part le creuset (voie sèche) et
d’autre part, l’agent salin (voie humide). Elle sert à séparer les éléments
pour les purifier (truelle) et par après les rassembler, les réunir. Solve
et coagula …
« L’épée qui blesse et la spatule
(truelle) chargée d’appliquer le baume guérisseur, ne sont en vérité qu’un seul
et même agent doué du double pouvoir de tuer et de ressusciter, de mortifier et
de régénérer, de détruire et d’organiser. »
Epée et truelle font du maçon un
défenseur et un bâtisseur, ce qui n’est point sans évoquer les caractères de
l’Ordre du Temple : défenseur contre lui-même et ses vices cachés,
bâtisseur de lui-même.
Comme en tout rituel de réception, ici
aussi, tous les acteurs de l’allégorie sont finalement en nous.
REBATIR LE TEMPLE
ebâtir un temple à la gloire du Grand
Architecte implique le premier temple fut détruit et nous trouvons en le rituel
et les tableaux multiples traces de cette destruction. Si on part du postulat
que la construction du temple reste l’œuvre maçonnique, on en déduira que la
franc-maçonnerie fut détruite. Nous y trouvons d’ailleurs le désordre en ses
symboles.
On peut donc s’interroger sur ce qui
détruit – outre le cadre mytho-historique – notre temple, notre tradition
maçonnique.
L’instruction nous donne deux
précieuses pistes :
La première :
·
Dans
quel état avez-vous trouvé les Maçons en arrivant sur les débris du Temple ?
·
Dans
le deuil et l'abattement, état de toute Loge livrée à la confusion et au
désordre.
·
Que
signifient les colonnes renversées, les instruments et les meubles déplacés ?
·
Que
toute Loge composée de Frères indiscrets et vicieux, perd l'harmonie qui en
fait le principal ornement, et ne peut tarder de se détruire.
La seconde :
·
Que la Maçonnerie doit être une, et ne peut souffrir de
changement sans altération.
La première nous interpelle sur le
fait que notre Ordre reste une institution humaine composée de FF\ et SS\ de tous ordres et
qualités dont, malheureusement parfois, des vicieux qui viennent en troubler
l’harmonie. Cela nous rappelle que le Maître Hiram fut assassiné par trois
francs-maçons, trois compagnons, trois FF\et non par des profanes.
Bien plus que des menaces externes du monde profane, nous devons être attentifs
aux dangers internes que représentent parfois nos FF\ et SS \ et nos institutions.
La seconde constitue une sérieuse
mise en garde qui, malheureusement, se rencontre de plus en plus de nos jours.
En effet, sous divers prétextes de modernisation, d’actualisation, de
simplification voire d’idéologisation, nous constatons que nos structures –
qu’elles soient à initiative obédientielle ou individuelle – modifient nos
rituels. Souvent avec une grande ignorance, on supprime ainsi des symboles
jugés obsolètes ou simplement estimés non-conformes à une pseudo-idéologie. Les
exemples furent multiples de la suppression du Prologue de Jean et de son
remplacement par un livre blanc à celle de la mention du GADLU.
Ceci altère voire détruit ce qu’est
notre tradition maçonnique. Je connais ainsi une loge – certes d’une grande
obédience belge – qui pour correspondre aux convictions idéologiques de ses
membres s’engagea dans une politique de simplification et de « laïcisation ».
Aujourd’hui, en cette loge, plus de tablier ni gants blancs, plus de tableau de
loge, plus de chandelier, plus de décors : juste le Delta, le soleil et la
lune. Quant aux rituels d’ouverture ou de fermeture des travaux, ils sont réduits
aux seuls croisement ou décroisement de l’équerre et du compas. Bien entendu,
il y a longtemps que les planches socio-philanthropo-politiques ont remplacés
l’étude des symboles. Si je n’ai point à juger et si je reconnais ses membres
comme mes FF\, je ne peux m’empêcher cependant de
m’interroger sur son caractère encore maçonnique de leur loge.
Si l’on considère que le temple,
c’est le maçon lui-même, on peut en déduire que notre premier temple fut
détruit, que nous fûmes captifs et qu’il nous appartient de reconstruire notre
temple. Ce qui nous est clairement indiqué en notre rituel
Ceci rejoint pour moi le concept de
réintégration spirituelle développé par MARTINEZ DE PASQUALLY
au sein de L’ordre des Chevaliers Maçons Elus Cohen de l’Univers.
Résumons très – et vraiment très –
brièvement. Créé à l’image de son créateur, l’Homme jouissait de vivre dans le
royaume divin, royaume qui n’est pas de ce monde. Comme d’autres entités
spirituelles (angéliques ou archangélique), il a renouvelé la faute des Anges
et préféré le Moi momentané, périssable, illusoire au Soi éternel, réel,
impérissable. C’est donc lui qui s’est momentanément éloigné de Dieu. Il voulut
s'égaler à Dieu et émaner à son tour des créatures qui dépendraient de lui.
Mais par le fait qu'il préférait le moi momentané, parce qu'il succombait à
l'illusion, il s’exclut lui-même du Plan Divin. C'est ce que nous rapportent ces deux légendes
identiques pour MARTINES DE PASQUALLY, celle de LUCIFER, premier des Anges, le
porteur de Lumière et celle d'ADAM, premier des Hommes au travers du
vocable »la chute ». La grande affaire de l'homme va donc être de
retrouver ce royaume perdu, ce royaume qui n'est pas de ce monde comme disent
les Evangiles. C’est la Réintégration spirituelle.
Telle était la philosophie ou plutôt
la théosophie de l’auteur du Traité de la Réintégration qui fondait sa foi en
la perfectibilité du genre humain et espérait la reconstruction du temple de
Zorobabel, du temple de l’Homme.
L’importance de la reconstruction du
Temple par Zorobabel est capitale dans la maçonnerie des Elus-Cohen en ses
ateliers supérieurs.
Si nous concevons la similitude entre
le temple de Salomon et celui de Zorobabel, tous deux se définissant comme
demeures de l’Eternel, selon les textes bibliques, le premier sanctuaire fut
construit par les Israélites pour abriter l'Arche d'Alliance.
Le temple de Zorobabel ne contenait,
lui, pas cette arche d’alliance, plus détenue alors par les Israélites.
Nous savons que ce symbole de l’union
pactisée entre Jehovah et son peuple fut un élément clef de la quête templière.
Dépourvu de cette alliance que nous
pouvons qualifier d’ancienne, notre désir visera en en établir une nouvelle, à
la remplacer.
PETITE REMARQUE
Le discours historique nous enseigne
que les Grands Elus se mirent en recherche de la voute sacrée, celle qui nous
fut dévoilée dans le grade précédent. Ils détruisirent, par prudence, le
piédestal de la science ainsi que la lame sacrée, le bijou d’Hiram.
La transmission de la tradition perd ainsi son symbole matériel et ne
consistera plus qu’à une transmission orale.
CONCLUSION
Arrivé au degré du IIIème
Ordre, le franc-maçon se doit d’établir le constat suivant :
1. Le temple de Salomon qu’il
avait construit est détruit ;
2. Il est invité à le
reconstruire mais ne bénéficie plus de l’alliance passée ;
3. Il ne dispose plus de
l’architecte pour diriger les travaux, celui-ci ayant été assassiné.
Mais il doit se souvenir
de l’équation mise en exergue par la maîtrise française
:
si le GADLU est bien JEHOVAH ,
si JEHOVAH est bien HIRAM
et si HIRAM est tout nouveau maître, alors …
Ce qui fera l’objet du prochain Ordre
de Sagesse qu’il abordera avec espérance (couleur verte).